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Comment j'ai failli me taper un écrivain hyper connu

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Comment j'ai failli me taper un écrivain hyper connu

21.04.2021, 11:5321.04.2021, 12:07
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Certaines personnes renvoient une image à l’opposé de ce qu’elles sont vraiment, vous avez remarqué?

C’est surtout flagrant chez les gens célèbres. Lorsqu’on a l’opportunité de les côtoyer et qu’on se rend compte de la supercherie, ça fait un choc. Comme quand on a appris que le révérend patriarche de la famille Camden de Sept à la maison était en fait un vieux pédophile. (Ouais, j’ai des références moyenâgeuse, faudra vous y faire).

Ça m’est arrivé avec un écrivain hyper-connu, qui a vendu des millions de bouquins à travers la planète et que tout le monde prend pour un saint. Vous me direz qu’il faut être un peu naïf pour y croire, mais parfois on aime se bercer d’illusions consciemment, histoire de d’accorder du crédit à la nature humaine, et de réprimer nos envies suicidaires.

Ben c’est raté!

J’ai contacté le mec en question via Twitter, sans vraiment trop y croire, en lui disant combien j’étais fan de son œuvre et en lui proposant une interview. Juste pour le plaisir de le rencontrer et de m’abreuver de sa science. Je ne suis même pas journaliste, mais le coup de l’interview, c’est une putain de bonne parade! A ma grande surprise, il m’a répondu assez rapidement en me fixant un rendez-vous pour un dîner rassemblant des auteurs en marge d’un prestigieux événement littéraire.

Incroyable!

Dans ce genre de situation tombées du ciel, on a deux possibilités: soit on se dit que c’est un canular et qu’on va se retrouver face à face avec Roger de l’entretien, sociopathe patenté. Soit que le type en question a une idée derrière la tête. Mais vu son aura, sa réputation de moine et son travail sur le développement personnel, j’ai préféré me dire que j’avais juste été bénie par la grâce sacrée de sa bonté surhumaine. Ou un truc dans le genre... J’ai opté pour la version qui venait nourrir mon égo: j’étais l’élue!

Avec tout de même une certaine appréhension de me faire recaler comme une malpropre, je me suis annoncée à l’entrée de la réception du lieu du rendez-vous, en état de semi-transe. «Bonsoir et bienvenue, Monsieur va bientôt arriver, servez-vous». On ne m’avait pas trompée! Je ne touchais plus terre. J’arpentais les locaux du Palais machin-chose en mode pilote automatique, avec une coupe de champagne à la main. J’ai vite eu l’impression désagréable que l’assistance balais-dans-le-cul se demandait bien ce que je pouvais foutre dans un lieu aussi chicos, étant donné que j’ai l’allure d’une ado attardée qui aurait élu domicile dans une friperie.

La star (plus toute jeune) est arrivée en trainant de la patte dans ses crocs. Je ne savais pas trop comment le saluer, vu que la courbette et l’agenouillement me semblaient un peu exagérés. Du coup, j’ai juste essayé de faire bonne figure pendant que Mister X évaluait à qui il avait à faire. Il s’attendait peut-être à ce que je débarque toute pimpante, en robe de soirée, mais j’avais décidé de limiter les risques qu’il s’agisse d’autre chose que d’une rencontre professionnelle. On sait jamais...

Il avait l’air plutôt déçu. Du coup, moi aussi. Jamais très agréable d’avoir l’impression d’être une erreur de casting. Mais c’était trop tard pour faire marche-arrière. On s’est assis à une table où sa cour de lèche-bottes – dont un ancien ministre français – nous a bientôt rejoints et où on a joyeusement picolé sans pouvoir vraiment se parler directement pendant quelques heures.

Attablée avec cette clique huppée, j’ai croisé un de mes potes journaliste dans le fond, qui prenait des photos. Il a jeté un regard dans notre direction, mais il ne m’a pas reconnue. Je me suis demandé quel tableau on pouvait se faire de ma situation. Une jeunette entourée de toutes ces vieux beaux célèbres. Je devais avoir l’air d’une groupie. J’étais trop mal sappée pour passer pour une escort.

Au bout d’un moment, l’auteur décide de mettre un terme aux mondanités pour que l’on puisse aller dîner en tête-à-tête.

Les choses sérieuses, enfin! Il appelle son chauffeur et fait venir sa limousine. Moi qui le prenais pour un sage, limite ascète, à prôner la richesse immatérielle à tour de pages, je commençais à déchanter. Mais j’étais déjà trop pompette pour me formaliser. Après tout, à son âge, et avec ses moyens, autant se faire plaisir, non? Même s’il ne doit pas reverser ses droits d’auteur à des œuvres de charité, ça ne remet pas en question l’ampleur philosophique de son travail, si?

Cap sur un restaurant branché de Genève donc, devant lequel je passe souvent sans jamais entrer. Trop cher pour mes ridicules revenus. On a pris un repas tranquillement en parlant de tout et de rien. J’étais fière de m’afficher avec lui, malgré ses crocs, que d’ailleurs personne d’autre n’aurait pu assumer avec un tel naturel. Entre les plats, des clients venaient lui demander des autographes ou prendre des selfies avec lui. J’essayais d’avoir l’air intelligente et spirituelle, mais j’avais dépassé depuis longtemps le niveau d’alcoolémie nécessaire à l’exercice.

On est sortis fumer et c’est là qu’il m’a proposé de l’accompagner au Festival de Cannes - dans son jet privé s’il vous plaît - afin qu’on puisse notamment se partager quelques femmes. Il m’a sorti ça tout à fait naturellement, comme s’il me proposait un peu plus de sucre dans mon café. Sur le moment, alcool aidant, j’ai trouvé ça plutôt punk et moderne de la part d’un type en crocs. Je n’ai pas vraiment percuté.

Ce n’est que le lendemain que j’ai repris pied avec la réalité. Et surtout, que ça signifiait que ce bonhomme n’avait rien du père la vertu que je m’étais imaginé. C’était un peu comme si Gandhi t’invitais à la fête du slip. Pas de quoi rejoindre les rangs des féministes adeptes de la castration chimique, mais tout de même un poil surprenant.

Pour être tout à fait franche, j’ai longuement réfléchi à la proposition. Ce n’est pas tous les jours qu’un type de son envergure te propose un truc pareil. Devoir se taper ce vieillard n’était après tout pas si terrible que ça. «Tu fermes les yeux et tu penses à la République», comme disait Amanda Lear (je vous avais prévenus pour mes références). Mais, j’ignore pourquoi, le semblant de morale qui me restait a fini par me dissuader de jouer ce jeu-là.

J’ai donc écrit à ce bon monsieur pour lui signifier que «merci, mais non merci». Et je n’ai plus jamais eu de ses nouvelles.

Depuis ce jour, quand je passe devant ses livres sur les étalages «best-sellers» des librairies, j’ai toujours un petit sourire narquois à l’idée qu’un tel monstre sacré de la littérature de série B puisse être un homme aussi banal.

Tu te poses des questions sur ton couple (inexistant ou pas)? Ecris-moi à:

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Pénélope Page...
...fait une entrée hyper stressante dans la trentaine, avec son lot d'expériences foireuses. Aussi spontanée et délurée que névrosée, Pénélope fait ce qu'elle peut pour dealer avec l'existence et sa dose de paradoxes. Tout comme vous! Comme elle en connaît un rayon sur les déboires amoureux, vous pouvez également lui poser vos questions les plus intimes. Elle vous répondra directement toutes les semaines. Et, n'ayez crainte, comme elle, vous resterez anonyme.
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